Alors oui, nous sommes partis et oui nous sommes rentrés.
Entre les deux, nous avons pris la voiture, le tram, le train, le RER, l'avion, le métro autrichien, marché à pied, encore le train autrichien cette fois, pour traverser une nouvelle frontière, puis le tram tchéque, marché, pris encore le train pour Prague, marché beaucoup marché, puis le train à nouveau, le tram, le train et la frontière, le métro, l'avion, le RER, le train, le tram et enfin la voiture.
Beaucoup d'incohérences, de contradictions, de surréalisme, d'ambivalence dans ce que vous allez lire.
Une semaine que j'ai passé dans une espèce de léthargie émotionnelle, une anesthésie émotionnelle, prendre les choses telles quelles sont, ne pouvant de toute façon rien y changer. Étrangement, j'étais très calme, même dans les moments assez angoissant, où j'avais vraiment du mal à respirer, je prenais ça "tranquillement".
Et j'ai beaucoup cogité.
Je suis partie stressée de laisser mes animaux.
J'ai eu des moments d'oppression, surtout au moment des repas (angoisses ??? réactions allergiques indiquées dans les effets secondaires du provames, je penche plus pour cette option). Cette sensation était vraiment fatigante. Du mal à manger, du mal à respirer normalement.
Les moments de difficultés à respirer se sont ensuite espacés. Le jeudi, je n'avais plus cette sensation.
Et puis, le dimanche soir de notre arrivée, gros coup de blues.
Voir, regarder, croiser, toutes ces femmes, filles, qui marchaient dans les rues de Brno.
Et finir par penser, "Pourquoi ne puis-je pas avoir la chance de faire mon enfant avec mes propres gènes"
"Est-ce que c'est celle-ci, où celle-là. Elle a un trop grand nez celle-ci".
"Qu'est ce que nous allons pouvoir raconter à cet enfant (s'il vient)".
"Pourquoi partir si loin, pour faire un enfant ??"
"Qu'est-ce qui se transmet le plus, les gènes où l'éducation ?"
"Mais pourquoi elles sont toutes habillées raz des fesses ??"
"Pourquoi, mes œufs à moi, ils sont pourris ??"
Des questions pour lesquelles, nous avions des réponses, mais qui tout d'un coup en fin de journée après voir croisés tant de femmes, devenaient obsédantes et laissaient penser qu'il faudrait peut-être renoncer, maintenant qu'il n'était pas encore trop tard !!
Donc petite discussion avec Chéri, sur le banc dans le parc.
Moi qui pensait avoir "régler" toutes les questions, depuis le temps que je les retournais dans ma tête (des années), voilà que je me retrouvais au pied du mur, avec beaucoup moins envie de sauter de l'autre côté.
D'accord, nous ne sommes pas venu jusqu'ici pour renoncer, allez on y vas !
Lundi matin, rendez-vous à la clinique, pour que Chéri donne de sa personne. Nous venons avec nos valises, parce-que ensuite nous prenons le train pour Prague.
Il y a du monde, un couple d'américain, un couple de personnes noires qui parlent en anglais, un couple d'italien avec une petite fille de 1 ans et demi, un autre couple d'italien, un couple de français, un couple tchèque. Et des jeunes femmes seules qui viennent (je me dis que ce sont les donneuses, où alors des jeunes femmes qui viennent pour des rendez-vous perso). Je me disais pourtant, que cela serait étrange qu'ils fassent cohabiter dans une même salle d'attente les donneuses et les receveuses. Chéri me dira plus tard que du côté garçon, il a croisé des jeunes hommes seuls.
Le doc nous reçoit, après les formalités d'usage, il dit : "10 ovocytes c'est bien, mais je ne sais pas encore s'ils sont matures où non. Vous devez appeler demain pour savoir combien ont été fécondés". Après il lance des mots que je ne comprend pas : "1984, A+, brune aux yeux bleus".
Je suis obligée de lui demander de répéter plus lentement : "1984, A+, brune aux yeux bleus".
Voilà MISS 1984A+bruneauxyeuxbleus, vient d'entrer dans notre vie. Idem que moi, sauf que moi c'est 1970A+bruneauxyeuxgrisbleus.
Moi qui pensait avoir besoin d'en savoir plus, je n'éprouve pas le besoin d'en savoir plus. Ne pas s'attacher, ne pas s'emmêler plus que ça. Garder de la distance avec ce qui est en train de se passer ??
Après l'échographie, qui montrera un endomètre moins important qu'en France. Le doc me dira : "une autre machine, un autre médecin, donne une taille différente". Oui sauf que moi, là d'un coup je flippe, mais cela passe très vite. Rassurée par ce qu'il me dit.
7.5 mm, il dit : "au dessus de 7 c'est bon".
Et là, je me sens inutile, plus rien à faire sauf qu'attendre, j'attends Chéri. Puis nous partons.
Le mardi, nous appelons : 7 ovocytes matures, et 6 fécondés. Je trouve que cela ne fait pas beaucoup.
Moi qui me voyait déjà à la tête d'une famille de 10 enfants !!! ; - ))
Le mercredi, nous oublions de téléphoner !! Oups, ça commence bien les parents indignes !! Enfin, Chéri en père responsable, pense que nous n'avons pas téléphoner à 16 h 30. J'appelle : toujours 6 embryons, mais un seul avec le bon nombre de cellules à ce stade. Bon nous voilà bien avancé avec cette info. Je trouve que c'est con de téléphoner pour savoir ça.
Le jeudi, nous pensons à téléphoner : 3 embryons avec un seul qui contient le nombres de cellules qu'il faut à ce stade. Bon et bien là, on aurais du ne pas téléphoner, cela me fait froid dans le dos. S'il ne reste que 3 bidules à J3, il ne restera pas grand chose à J5 !!! Mais là encore, sur l'instant cela me fait mal, mais finalement cela passe vite. Je me dis on verra bien samedi. Car pas le peine de téléphoner vendredi, si vous voulez vous pouvez. Nous décidons de ne pas téléphoner, histoire de rester cool. Enfin, moi je suis calme, mais Chéri, lui stresse.
Vendredi, nous prenons le train dans l'autre sens, retour à Brno.
Samedi, rendez-vous à la clinique, sans savoir ce qui nous attends. Toujours avec nos valises, car nous repartons à Vienne ensuite.
Clinique vide, l'accueil se trouve dans une autre pièce que nous ne connaissions pas.
L'accueil est charmant, d'autant que nous disons trois mots en Tchèque.
Sont déjà là le couple d'italien avec leur petite fille. Enfin, le monsieur est seul avec sa fille, sa femme étant en salle de transfert.
Puis arrive le couple d'américain, la dame part toute de suite seule, lorsque nous ressortirons elle ne sera toujours pas là. Je me demande bien ce qu'elle faisait.
Un couple de tchèque arrive, ils voient la gynéco, puis partent en salle de transfert.
Ensuite c'est notre tour.
Elle nous reçoit en anglais, moi qui comprend mais à qui il manque trop souvent des mots pour faire de belles phrases, je compte sur Chéri.
Elle dit que nous avons 4 embryons (donc pas les trois de jeudi).
Un qui est au stade de morula, un blastocyste et deux autres. Elle dit que c'est très bien.
Elle demande si nous voulons transférer un ou deux.
Nous disons deux.
Elle demande si j'ai assez de médicaments, qu'ils faut tous continuer.
Elle demande si je suis en bonne santé ? "oui". Si j'ai déjà été opéré ? "non". Si je fume ? "non".
Elle nous souhaite des jumeaux.
Demande si j'ai des questions.
Je lui demande pour les piqures de gonadotrophine, que toutes les filles du forum Maia, se font en plus.
Elle me dit que ce n'est pas utile. Que la fonction progestérone est assurée par les ovules dans le vagin.
Elle dit que les femmes font les piqures par "superstition", pour être sure de mettre toutes les chances de leur côté.
A la clinique, il ne préconisent pas ça. Disant que le produit passe dans le sang, le foie et donc arrive quelque peut "éventé" pour faire son effet. Alors que les ovules sont mis à l'endroit qu'il faut.
Mais si je veux, je peux le faire. Non, je ne voulais pas le faire, j'en avais déjà parlé au doc gynéco en France qui m'avait dit la même chose. Alors je voulais m'éviter des piqures.
"Finalement, je ne suis pas prête à tout faire, où bien suis-je en train de lutter contre les superstitions ???"
Je reste quand même avec une idée en tête sur ce sujet. Les piqures de gonadotrophine, ne permettent-elles pas de lancer au niveau global du corps un signal ? Qui permettrait ensuite à l'ensemble de mieux fonctionner. Bon je n'ai pas de réponse, peut-être il y a t-il parmi vous des qui s'y connaissent en hormonologie.
Et puis en cas de réussite ou d'échec, nous n'avons pas beaucoup de moyens de savoir ce qui a fait que cela à fonctionné ou pas. Un bon ovocyte, un bon spermato, un bon endomètre, un bon taux d'hormones, et bon coup de chance, etc.......
Retour en salle d'attente, puis une autre dame, nous accompagne en salle de transfert.
Là je me sens un peu excitée, comme si nous allions faire un grand jeu, joyeux.
Jolie salle pour se déshabiller, la dame charmante.
Je m'allonge, les pattes en l'air. Je n'aime pas cette position gynécologique et je ne voulais pas que Chéri, me voit comme ça.
Je l'avais prévenu.
Finalement, un drap est prévu, pour mettre sur les jambes en l'air.
Musique douce, Chéri me dira ensuite qu'au moment du transfert c'était du Phil Collins.
Nous attendons la doc que nous avons vue.
Je tente de me décontracter du croupion le plus possible, parce que je n'aime pas du tout lorsque le spéculum cherche mon col.
Elle arrive, disant que sur l'écran nous allons voir les embryons que la biologiste prépare à côté.
Effectivement, sur l'écran en haut, je vois :
Une microscopique poussière d'humanité, puis une deuxième.
La charmante dame, pose la sonde échographique sur mon ventre, pour permettre au doc de voir où elle met le cathéter. Moi je regarde les poussières d'humanité. Se détendre du croupion aussi.
La biologiste arrive, elle lance un "BONJOUR" en Français et me demande mon nom.
Ok
Voilà, sur l'écran de l'échographie, une minuscule tache blanche. La gynéco dit que ce sont nos deux poussières qui se trouvent maintenant au fond de mon utérus.
Elles vont vérifier que le cathéter est vide.
Les trois charmantes dames, nous souhaitent "bonne chance" .
Je dois rester allonger sans bouger 10 minutes.
Là je m'agite, déjà, si vite, même pas mal.
Chéri gronde, pas bouger.
Alors j'attends, même pas émue (enfin si un peu), mais consciente de la fragilité de la situation, que nous ne sommes qu'au début du chemin et que les épreuves sont longues et nombreuses. Alors impossible de me réjouir, impossible d'imaginer la réussite au bout du cathéter.
Ce n'est que le début de l'histoire et pour le moment, je ne peux me réjouir.
Car le dénouement est encore loin et bien incertain.
Juste profiter du fait que j'ai deux minuscules poussières d'humanité au creux de mon utérus et que j'aimerais tellement, qu'elles désirent devenir de petits humains.
Nous partons, après avoir reçu le compte rendu du traitement, payé la facture.
Hop le tram, puis le train.
Chéri porte ma valise, c'est drôle. J'ai l'impression d'être une star avec son boy à côté qui porte ses sacs.
Le train pour Vienne, puis l'hôtel allongée à ne rien faire.
Lundi soir, mail de la clinique : "pas d'embryons congelés".
Déjà l'impression que les deux poussières ne sont déjà plus là.
Y aller doucement au boulot.
Mais ne pas vouloir vivre dans du coton non plus.
Savoir qu'ils étaient vivant samedi, mais ne rien préjuger sur maintenant.
Car cela serait pitoyable, de chérir deux poussières qui ne sont déjà plus là.
Alors j'espère, tout en étant assez négative par rapport à l'issue.
Je les aimes ces grains de pollen humain, bien avant de les avoir vue, mais ce voyage ce n'était pas "le merveilleux pays des bébés" comme je le vois si souvent écrit sur le forum.
Juste un endroit bien loin de chez nous, qui nous donne l'opportunité de tenter d'avoir des enfants.